Télétravail, l’impossible retour en arrière ? [Les Echos Capital Finance ]

Une charte pour encadrer

C’est le cas chez Seven2, ou encore Capza par exemple. Plusieurs fonds expliquent que le passage d’un accord oral à un accord écrit s’est parfois fait à la suite d’une situation managériale complexe. « Il y a eu un cas avéré d’abus de la part d’un employé », témoigne le dirigeant d’une société de gestion, tandis qu’un autre explique qu’un manager a tout simplement décidé de ne pas l’autoriser dans son service après une mauvaise expérience.

« Pour anticiper les mauvaises surprises que génère le télétravail, il est indispensable de l’encadrer, quelle que soit la taille de l’entreprise. En présence d’un CSE, ouvrir les discussions est essentiel pour adapter précisément les conditions à l’entreprise. Mais même sans représentation du personnel, le TT est mieux vécu par tous lorsqu’il est régi formellement », estime Laetitia Guetta, qui rappelle que l’effectif moyen d’un fonds adhérent de France Invest est de 22 personnes.

D’autres GPs ont tout bonnement décidé de ne pas autoriser le télétravail. C’est le cas d’InfraVia, qui estime que cela nuit à l’esprit d’équipe, à la transmission des connaissances, des valeurs, et à l’intelligence collective. Des réserves que partagent effectivement les cadres interrogés dans l’étude de l’Apec citée précédemment, même si au final ils estiment les avantages supérieurs.

Risque de turnover

Une interdiction catégorique ne risque-t-elle pas de priver InfraVia et les autres fonds ayant suivi cette position des meilleures juniors alors que la compétition est ardue ? « Cette question se pose moins pour les fonds les plus attractifs, mais c’est effectivement un risque pour les fonds un peu moins cotés », admet Margaux de Bar, principal chez Vauban Executive Search. Le cabinet de recrutement évoque justement l’un de ses clients contraint de revoir sa position sur le télétravail après avoir perdu plusieurs juniors prometteurs sans carried interest faute de télétravail. « La discussion n’a pas été facile, il y avait une forme de choc générationnel entre ce dirigeant et le télétravail », se rappelle-t-elle.

Le fait est qu’un grand nombre de sociétés de gestion sont dirigées par des hommes quinquagénaires pour qui le travail à distance n’a en effet jamais été un sujet. Or, aujourd’hui, rares sont les entretiens pendant lesquels il n’est pas évoqué, assurent pourtant les chasseurs de têtes. « Ce n’est pas abordé lors du premier rendez-vous – ce serait sûrement un assez mauvais signe –, mais au deuxième ou au troisième échange la possibilité ou non de télétravailler est évoquée », constate Margaux de Bar. Et en réalité, les juniors ne sont pas les seuls à le réclamer. Les jeunes parents, déjà partners ou s’apprêtant à le devenir, autrement dit des profils attractifs pour des fonds, sont également demandeurs. « D’autant que certains en ont profité pour s’installer dans des villes moyennes après le Covid », reprend-elle.

Zone de recrutement élargie

En réalité, cette nouvelle donne peut-être une opportunité pour les fonds. En autorisant le télétravail, ils élargissent grandement le périmètre de leur recrutement potentiel. « Nous avons par exemple rencontré le cas lors de l’ouverture d’un bureau régional pour un fonds Smid Cap. Le siège étant à Paris, des allers-retours allaient de toute façon avoir lieu. Il a donc été décidé d’ouvrir très largement la zone de recrutement. Et cela va dans les deux sens », signale Laetitia Guetta.

Plusieurs éléments consubstantiels au private equity plaident d’ailleurs en faveur du télétravail. « Les gens sont globalement brillants et donc plus facilement autonomisables. Par ailleurs, les résultats sont très aisément quantifiables. Il est donc facile de dire s’il y a un problème. Un argument de plus en faveur de l’autonomie, tout comme l’existence du carried interest », soutient Harold Valat, associé chez Vauban Executive Search. Par ailleurs, très basiquement, la démocratisation des entretiens par visio, effet secondaire du télétravail, a grandement facilité les recrutements dont le premier entretien est généralement réalisé de cette manière.
(…)

Publié et Mis à jour le 18 avr. 2024 à 11:39 par Gabriel Nédélec

Pour la suite consultez https://capitalfinance.lesechos.fr/analyses/dossiers/teletravail-limpossible-retour-en-arriere-2088613