Le trésorier se retrouve au centre du jeu [L’AGEFI]
Publié le 14 novembre 2023 – Hélène Truffaut (L’AGEFI)
Traditionnellement discrets, les trésoriers se retrouvent en pleine lumière. La succession de crises – financière, sanitaire, géopolitique … – qui ont ébranlé et continuent d’affecter les entreprises depuis 2008 a renforcé leur aura. « Ils s’occupent d’une denrée rare et de nouveau chère qui est l’argent. Et cela redevient un sujet pour les directions générales », observe Emmanuel Rapin, vice-président référent de la formation de l’Association française des trésoriers d’entreprise (AFTE).
De fait, leur mission ne leur aura pas laissé le temps de souffler ces dernières années ! Eminent spécialiste de la liquidité, « le trésorier est le garant de la bonne ‘circulation sanguine’ de son entreprise, résume Jean-Claude Climeau, directeur de la trésorerie, des financements et de l’ingénierie financière de Thales, également vice-président de l’AFTE. Il doit s’assurer de la disponibilité du cash et parer aux risques de marché. » Signe des enjeux stratégiques que recoupe la fonction, la trésorerie n’est plus l’apanage des grands groupes, ETI et grosses PME s’étant approprié la fonction, exercée par des profils davantage polyvalents.
Le cash management, le financement externe et la gestion des risques (de change, de taux) sont de fait les trois grands piliers de la fonction trésorerie qui, en fonction de la taille de la structure, s’organise en équipes distinctes et intègre, le cas échéant, le financement du commerce international. « Le trésorier peut également superviser le credit management, la gestion des assurances et, tendance plus récente, la communication financière et les relations investisseurs », complète Emmanuel Rapin.
Le métier a évolué
S’il repose sur un socle inchangé de savoir-faire technique, l’exercice du métier a dans le même temps évolué au gré de l’automatisation des services, mais aussi de la transformation de la relation client, avec l’émergence de nouveaux moyens de paiement. « Le digital est incontournable et l’on attend aujourd’hui d’un trésorier une appétence pour les enjeux et les solutions technologiques», souligne Jean-Claude Climeau. Ces dernières années ont d’ailleurs vu apparaître les postes de responsable de projet ou de système de gestion de trésorerie, occupés par des experts en informatique. C’est le cas chez Thales, dont la fonction trésorerie – forte de quelque 90 personnes, filiales comprises – dispose d’une équipe informatique intégrée pour déployer et entretenir ses propres outils.
Impossible également pour les trésoriers d’échapper aux problématiques de responsabilité sociétale des entreprises (RSE) qui ont, plus récemment, gagné les directions financières. « Ils sont en relation avec les agences de notation extra-financière et ont eux-mêmes de plus en plus recours à des produits financiers ‘verts’ ou socialement responsables », explique Emmanuel Rapin, pour qui ce mouvement, parti des grands groupes, se décline à présent dans les ETI.
Le savoir-faire en communication devient plus important pour faire avancer les sujets. « Le trésorier doit être capable d’interagir avec davantage de fonctions qu’auparavant, faire preuve de pédagogie sur son métier et endosser le rôle de ‘business partner’ auprès des opérationnels. Autant pour parler de leurs objectifs de réduction de CO2 que des délais de paiements ou des stocks dans un contexte inflationniste », illustre le directeur de la trésorerie de Thales.
En outre, les directeurs et responsables de service sont attendus sur « un management plus souple et participatif propice à l’intégration des juniors – ce qui est nouveau pour des profils parfois issus d’environnements très rigoureux », explique pour sa part Harold Valat, associé au sein du cabinet Vauban Executive Search. Tandis que « les jeunes candidats doivent surtout faire preuve d’ouverture, de curiosité et adopter une posture d’apprentissage permanent, car le métier ne cesse d’évoluer », considère Jean-Claude Climeau.
Un marché de l’emploi dynamique
Les besoins en recrutements sont à la hauteur des enjeux de transformation et des turbulences actuelles combinés, et de la nécessité de rajeunir la pyramide des âges de la profession. Selon l’enquête réalisée par Mazars et l’Association du master trésorerie de la Sorbonne (AMTSA) auprès de tous les alumnis et restituée fin septembre (15 promotions, 190 réponses), la moitié des répondants évoquent des difficultés d’embauches. Et, parmi les solutions que ces derniers envisagent, 20 % citent des augmentations de salaires …
« Le marché de l’emploi se porte très bien, confirme Elisabeth Chevillard, fondatrice du cabinet EC-RH, spécialisé dans le recrutement en finance d’entreprise et particulièrement versé dans la fonction trésorerie et financements. Les trésoriers sont généralement passionnés par leur métier et évoluent essentiellement dans leur environnement. C’est une niche mais elle offre de nombreuses possibilités de mobilité interne (direction financière ou extension du périmètre du directeur financement et trésorerie aux problématiques de communication financière, credit management …) et externe, permettant à ces professionnels d’élargir leur horizon. »
Missionné sur des postes de direction trésorerie et financement ou de directeur administratif et financier (DAF) ayant la responsabilité de la trésorerie, Vauban Executive Search reconnaît aussi la bonne tenue de ce marché de l’emploi, « raisonnablement en tension, mais sur lequel il faut agir très vite au vu des opportunités qui s’offrent aux candidats », remarque Harold Valat, associé du cabinet.
Plus généralement – et sans surprise -, les fonctions de front-office (exécution des opérations en lien avec les banques et les marchés) sont les mieux rétribuées (voir le tableau). « Moins rémunérateur, Je backoffice, qui enregistre les opérations et fait la jonction avec la comptabilité et le contrôle de gestion, s’appuie autant sur des juniors que sur des profils très aguerris pour encadrer ces derniers, détaille Emmanuel Rapin. Les jeunes diplômés sont aussi présents dans le middle-office (analyse et contrôle). »
Un salaire annuel médian à 41.200 euros
Similaire à celui que peut attendre un bac+5 issu d’une école de commerce et de management, le salaire d’un jeune débutant en trésorerie s’élève à plus ou moins 40.000 euros annuels, avec des variations entre Paris et la province et en fonction de la taille de l’entreprise.
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