Logement: projet de loi Duflot adopté en première lecture
L’Assemblée nationale a voté mardi en première lecture le projet de loi Duflot sur le logement, dont les deux mesures clefs, la garantie universelle des loyers et leur encadrement, suscitent de vifs clivages, alors que d’autres dispositions sont plus consensuelles.
Le texte a été adopté par 312 voix pour, 197 contre et 44 abstentions. L’UMP a voté contre, l’UDI et le Front de gauche, pour des raisons différentes, se sont abstenus, ainsi que les deux élus FN, tandis que socialistes, écologistes et radicaux de gauche ont voté pour.
Ce projet de loi Alur (Accès au logement et urbanisme rénové), présenté par la ministre du Logement Cécile Duflot et prochainement examiné au Sénat, avait été âprement débattu la semaine dernière dans l’hémicycle dans une ambiance généralement calme, sans que les 270 amendements adoptés n’en modifient profondément le contenu.
Le texte instaure d’ici au 1er janvier 2016 une Garantie universelle des loyers (Gul), qui protégera les propriétaires des impayés en se substituant à la caution. Le financement précis reste à déterminer mais devrait s’appuyer sur une cotisation, payée à parité par bailleurs et locataires, comprise entre 1% et 2% du loyer.
Il encadre aussi les loyers dans les zones tendues, où la demande excède largement l’offre de logements. Les préfets y fixeront chaque année par décret un loyer médian de référence majoré de 20%, au-delà duquel le propriétaire ne pourra pas aller, mais aussi un loyer plancher (inférieur de 30% au loyer médian) en deçà duquel il pourra demander une hausse.
Par ailleurs, les 86 articles du projet de loi, et même les 150 si on ajoute les nombreux articles « bis » ou « ter », réforment en profondeur beaucoup d’aspects de la politique du logement, avec en particulier une modification des règles régissant les copropriétés. Ainsi, les syndics seront obligés d’ouvrir un compte séparé pour chaque propriété dont ils ont la charge.
Autre volet important du texte, la lutte contre l’habitat insalubre a fait l’objet d’un consensus dans l’hémicycle, en particulier l’interdiction faite aux marchands de sommeil déjà condamnés pour habitats indignes d’acheter pendant cinq ans des biens immobiliers destinés à la relocation.
En matière d’urbanisme, une large part des compétences seront transférées des communes aux intercommunalités.
En ce domaine, le projet de loi supprime les coefficients d’occupation des sols, de façon à densifier les terrains en zone pavillonnaire, et d’accroître la production de logements. A l’inverse, en milieu rural, il prévoit le reclassement en zones naturelles de certaines zones à urbaniser.
L’UMP, a expliqué mardi dans l’hémicycle le député Jean-Marie Tetard, affirme « une opposition totale » à un texte qui veut « faire entrer le logement locatif privé dans la sphère de l’économie administrée » et « va dérourager l’investissement » dans ce secteur. L’ancien ministre du Logement Benoist Apparu, qui était beaucoup intervenu contre le texte durant le débat, s’était toutefois déclaré à titre personnel pour les plans locaux d’urbanisme intercommunaux.
Ce projet, aux yeux de Michel Piron (UDI) « alterne les pires erreurs et le meilleur ». Au rang des premières, figure l’encadrement des loyers « économiquement absurde, socialement dangereux et injuste », et dans les éléments positifs, les dispositions sur l’urbanisme et les copropriétés. Quant au Gul, l’UDI « soutient le principe mais est hostile au dispositif ». Le député-maire de Neuilly, Jean-Christophe Fromantin, a été le seul élu UDI à voter contre, les autres s’abstenant.
Pour sa part, le Front de gauche craint que l’encadrement des loyers n’aboutisse à une hausse pour certains d’entre eux et est très opposé aux mesures sur l’intercommunalité, « imposée à coups de gourdin », selon le député communiste André Chassaigne. En revanche, il approuve la Gul.
Ecologistes et radicaux de gauche ont, les uns et les autres, dit voter le projet « avec enthousiasme ». « Ne boudons pas notre plaisir », a déclaré l’écologiste François de Rugy en vantant les mérites d’un texte élaboré par une ministre de son parti, tandis que le radical de gauche Jacques Krabal s’est félicité d’une réforme « équilibrée ».
Un équilibre souligné aussi par le socialiste Christophe Borgel qui a insisté sur le « volontarisme » d’un projet « dans un secteur où on a laissé trop longtemps le désordre se développer ».
Source: Le Point